La proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement enfin adoptée !

Dans un précédent article, je vous présentais la proposition de loi Ferrand-Fesneau telle qu’elle avait été adoptée par l’Assemblée Nationale en première lecture le 30 janvier 2018.

Depuis ce texte a fait l’objet de nombreux échanges puisque l’Assemblée Nationale et le Sénat ne sont parvenus à aucun accord y compris en Commission Mixte Paritaire.

Suite à une nouvelle lecture devant l’Assemblée Nationale et le Sénat, un texte a finalement été adopté et promulgué : la loi n°2018-702 du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux Communautés de communes.

Cette courte loi de 4 articles prévoit tout de même des modifications importantes quant à l’exercice intercommunale des compétences eau et assainissement :

 

1/ Sur le caractère obligatoire du transfert de ces compétences (article 1er):

Il s’agit probablement du point le plus sensible des débats entre l’Assemblée Nationale et le Sénat, ce dernier souhaitant une abrogation des dispositions de la loi NOTRe qui avaient rendu ces transferts obligatoires pour toutes communautés de communes et communautés d’agglomération au plus tard le 1er janvier 2020.

Finalement, il sera possible pour les communes membres des seules communautés de communes de s’opposer au transfert de l’une ou de ces compétences sous certaines conditions:

  • ne pas exercer, à titre optionnel ou facultatif, la compétence au jour de la publication de la loi, soit le 5 août 2018,

 

  • recueillir une minorité de blocage (25% des communes représentant au moins 20% de la population) s’opposant au transfert de la compétence ou des compétences avant le 1er juillet 2019.

Durant cette période transitoire de 2020 à 2026 et s’il y a eu opposition au transfert de la compétence ou des compétences, le transfert peut être redemandé par la communauté de communes. Les communes membres devront alors s’exprimer sur ce transfert de compétence dans un délai de trois mois en pouvant faire à nouveau jouer leur minorité de blocage.

 

S’il permet d’apporter de la souplesse, ce texte a tout de même certaines limites:

  • cette possibilité de s’opposer au transfert au 1er janvier 2020 ne concerne que les communautés de communes (le transfert resterait obligatoire au 1er janvier 2020 pour les communautés d’agglomération), qui n’exerçaient pas déjà les compétences eau ou assainissement à la date de la publication de la loi,

 

  • il ne s’agit pas d’une réelle opposition au transfert mais d’une seule possibilité de différer le transfert de ces compétences du 1er janvier 2020 au 1er janvier 2026. Le transfert des compétences eau et assainissement aura en tout état de cause lieu le 1er janvier 2026 au plus tard.

 

2/ S’agissant des composantes de la compétence « assainissement » (article 3) :

Des différences d’interprétation subsistaient quant à l’intégration de la gestion des eaux pluviales dans la compétence « assainissement ».

La loi Ferrand-Fesneau permet d’éclaircir certains points.

En effet, les compétences assainissement des eaux usées et gestion des eaux pluviales urbaines sont désormais explicitement scindées en deux compétences distinctes avec des incidences différentes selon les types d’intercommunalité:

  • pour les communautés de communes, seule la compétence « assainissement des eaux usées » apparaît dans le texte de l’article L. 5214-16 du CGCT ; cela signifie donc que la gestion des eaux pluviales urbaines serait une compétence facultative et non optionnelle ou obligatoire ;

 

  • pour les communautés d’agglomération, les compétences « assainissement des eaux usées » et « gestion des eaux pluviales urbaines » sont des compétences optionnelles jusqu’au 1er janvier 2020 et deviendront obligatoires le 1er janvier 2020 au plus tard (article L. 5216-5 du CGCT) ;

 

  • pour les communautés urbaines et les métropoles, ces deux compétences sont exercées au titre d’un même bloc de compétences obligatoires incluant également l’eau.

3/ S’agissant des incidences des transferts des compétences eau et/ou assainissement pour les syndicats:

Cette loi fait une nouvelle fois une distinction entre les communautés d’agglomération et les communautés de communes :

  • pour les communautés de communes, le mécanisme de retrait automatique des communes membres d’un syndicat d’eau et/ou d’assainissement lorsque au jour du transfert de compétence, ce dernier regroupe des communes appartenant à moins de trois établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre a été supprimé ; les syndicats d’eau et d’assainissement obéissent alors aux mêmes mécanismes de représentation-substitution,

 

  • pour les communautés d’agglomération, ce mécanisme de retrait automatique (avec possibilité de s’y opposer) se maintient lorsque le syndicat regroupe des communes appartenant à un unique EPCI ce qui ne permet donc un maintien du syndicat que si ce dernier regroupe des communes appartenant à plusieurs EPCI (sous réserve que l’un d’entre eux n’utilise pas la possibilité de se retirer dudit syndicat après consultation de la CDCI).

Reste alors à voir comment ce nouveau texte va s’appliquer en pratique. En effet, de nombreuses communautés ou syndicats d’eau ou d’assainissement ont déjà engagé des réflexions profondes pour identifier l’échelle d’exercice la plus cohérente pour ces compétences au regard de l’échéance du 1er janvier 2020 initialement retenue et au regard des risques importants de disparition des « petits » syndicats d’eau ou d’assainissement…